Depuis combien de temps es-tu architecte d’intérieur ?
Je me suis mis à mon compte le 1er juillet 2014.
Auparavant, est-ce que tu exerçais déjà en tant qu’architecte d’intérieur ?
Non. Architecte d’intérieur c’est ma formation initiale. Je suis passé par une école des Beaux-Arts pour la formation. A la sortie de l’école j’ai fait deux trois jobs mais je ne trouvais pas ce que je voulais donc j’ai bifurqué temporairement vers des bureaux d’étude technique du bâtiment.
Après quelque temps, ce travail ne me correspondait plus donc je suis revenu sur ce projet d’architecture d’intérieur. Mais à 30 ans passés je n’avais pas envie de repasser par les stages, les agences, etc… J’ai donc fait un complément de formation et me suis lancé directement. Je me sentais prêt à m’installer.
Quand as-tu choisi exactement cette nouvelle activité ?
Au moment ou j’ai réalisé que mon travail en bureau d’étude ne convenait plus à mon équilibre personnel et que mon souhait avait toujours été de faire de l’architecture d’intérieur.
Est-ce que tu travailles en cabinet ou es-tu indépendant ? Quel est ton statut exact ?
Indépendant. J’ai monté une EIRL, Entreprise Individuelle à Responsabilité Limitée.
Quelles sont les raisons qui t’ont poussé à franchir le pas de l’indépendance ?
J’ai mal vécu ma dernière expérience en tant que salarié, j’ai cherché à savoir pourquoi, j’ai pris du temps pour discuter avec un coach spécialisé dans le monde du travail et nous sommes arrivés à la conclusion que j’étais fait pour travailler en indépendant plutôt que salarié. J’avais déjà ce souhait dans un coin de ma tête, cet accompagnement m’a ouvert les yeux et m’a conforté dans cette orientation.
Comment s’est fait le choix de l’EIRL ? De ce statut plutôt qu’un autre ?
J’ai élaboré mon projet professionnel avec un conseiller à la création d’entreprise qui m’a été octroyé par Pôle Emploi dans le cadre d’un suivi individuel. Cela m’a permis, entre autre, d’établir le business plan et d’étudier les différentes possibilités de statuts. Etant donné que j’avais acquis des droits au chômage, je pouvais démarrer mon activité en étant indemnisé sous forme de mensualités.
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Ce statut m’a permis de ne pas impacter fiscalement le peu de chiffre d’affaire du début d’activité et d’assumer les charges grâce aux quelques dividendes ainsi qu’au prêt à l’installation que j’ai contracté.
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Quels sont pour toi les avantages de ce statut d’EIRL ?
J’avais comme choix l’EIRL et l’EURL. Cette dernière m’offrait les mêmes droits que l’EIRL, mais ses coûts de fonctionnement tant au niveau comptable qu’au niveau de la création de l’entreprise sont beaucoup plus élevés, sachant qu’il faut également prévoir un capital social, même minime.
Aujourd’hui es-tu satisfait de ce choix de statut ? Quelles en sont pour toi ses contraintes et ses limites ?
Oui je suis satisfait de ce statut. La contrainte principale est que je suis TNS (Travailleur Non Salarié) et qu’avec ce statut je réalise à présent que la couverture santé est limitée, les organismes sociaux sont peu généreux avec les TNS et il faut mettre de sa poche pour avoir des garanties à peu près équivalentes à ce dont je pouvais bénéficier en tant que salarié. En y réfléchissant maintenant l’entreprise est un bon point du fait de pouvoir se salarier et prétendre à des droits un peu supérieurs au statut de TNS. Pour moi c’est vraiment le gros point noir.
Quels sont les avantages pour toi du statut d’indépendant ?
Le fait de ne pas dépendre d’un supérieur hiérarchique est déjà une forme de liberté en soi. Les rapports humains sont une source majeure de conflits au travail : valeurs personnelles, caractère, comportement social,… Quand la personne qui te donne des ordres est ton opposé sur ces points, les journées au travail deviennent compliquées.
Egalement la flexibilité au niveau de l’emploi du temps qui est idéale quand comme nous tu as un enfant en bas âge, au niveau organisationnel c’est génial !
Et puis il y a une reconnaissance immédiate, c’est très gratifiant d’avoir un retour de ses clients en direct. Il n’y a pas le filtre de la hiérarchie qui, souvent, te transmet très rapidement un feedback négatif du client, mais fait de la « rétention » lorsqu’il est positif.
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Et puis je sais pourquoi je travaille, j'ai une vue sur l'activité globale de l'entreprise, pour moi ce n'est que du positif.
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Est-ce que tu envisages une évolution de ce statut ?
Si l’activité fonctionne et je l’espère, c’est de pouvoir passer en société pour embaucher et devenir salarié de l’entreprise. Ce ne sera pas avant quelques années, je suis encore en phase de lancement. On m’avait parlé de 3 ans pour « tester » la viabilité d’une entreprise, et je le vérifie. Cela fait un peu plus de deux ans maintenant que je suis installé, le bouche à oreilles évolue bien mais je n’ai pas encore suffisamment de chiffre d’affaire pour dégager un salaire régulier. Le test va donc être au terme de la troisième année comptable : étudier la tendance générale, voir la progression de l’activité et si cela vaut le coup de continuer ou pas. Pour l’instant je suis plutôt confiant la progression est bonne.
Fais-tu appel à des prestataires pour t’accompagner en tant que responsable d’entreprise ?
Oui, un expert comptable s’occupe de toutes mes déclarations et gère la clôture du bilan comptable. Je mène actuellement des démarches pour être accompagné par un nouveau cabinet comptable. L’objectif de ce changement est de me libérer l’esprit des écritures comptables en ne faisant qu’une saisie sommaire de ma comptabilité tous les mois et de bénéficier d’un véritable accompagnement avec une feuille de route car pour l’instant je n’ai que peu de visibilité sur l’avenir et c’est très handicapant. Ces personnes ont l’expérience pour me guider et ont déjà su m’apporter des éléments utiles alors même que leur mission n’a pas encore commencé.
Parlons à présent de communication.
Au lancement de ton activité comment as-tu communiqué, quels outils as-tu utilisé ?
J’ai commencé par réaliser mon logo. Ensuite j’ai créé un site internet. Je me suis fait aider par une relation qui avait des compétences dans ce domaine et m’a montré les ficelles de la création d’un site sur WordPress. Puis je me suis chargé de l’habillage, du contenu, tout cela par économie de moyens. J’envisage maintenant de me faire aider par un prestataire pour le faire évoluer.
J’ai également recherché les réseaux et les sites sur lesquels être présents, Facebook, Linkedin, Twitter, Pages Jaunes, Google et des sites spécialisés dans l’agencement comme Houzz. L’objectif étant d’être le plus visible possible sur la toile.
Au lancement j’avais également réalisé une carte de visite dont j’avais moi-même réalisé la conception et que j’avais fait imprimer par un prestataire de type Vistaprint. Je me suis rapidement rendu compte qu’elle n’était pas efficace donc j’ai contacté un imprimeur local qui avait en interne un service de création. Il m’a fait deux ou trois propositions pertinentes. J’ai maintenant un outil efficace et dont je suis fier ! Rien de pire que de distribuer un support dont on arriverait presque à s’excuser parce qu’on le trouve « moyen ».
As-tu fait de la publicité dans la presse écrite ou sur des sites spécialisés ?
Dans la presse écrite non, mais sur Houzz.fr par exemple cela permet de se mettre en contact avec d’autres prestataires du bâtiment, des artisans. Cela permet aussi de travailler avec les clients, c’est un outil collaboratif et une grande source d’inspiration.
Es-tu membres de réseaux professionnels ?
Oui, grâce à une autre indépendante qui faisait de l’agencement de cuisines et qui était installée près de chez moi. Elle m’a invité à assister à une réunion d’un groupe dédié à la recommandation professionnelle. C’est un réseau qui s’appelle BNI, qui est composé de groupes dans toute la France. J’ai été assez convaincu par le principe : faire partie d’un réseau d’une trentaine de professionnels (avocat, comptable, artisan, commerçant, prestataire de service,…) que l’on rencontre une fois par semaine, et où chacun est là pour aider l’autre par le biais du partage de réseaux. Le montant annuel de la participation financière pourrait s’apparenter à un petit budget publicitaire chez Google ou Pages Jaunes, mais le seuil de rentabilité est bien meilleur.
Justement, quelles ont été les retombées suite à tout ce que tu as mis en place ? Qu’est ce qui a fonctionné ?
Sur Facebook je n’ai eu que des contacts pour des partenariats avec des artisans, des artisans d’art qui souhaitaient me présenter leurs savoirs faire et se placer par rapport à mes éventuels clients, mais cela n’a pas généré d’activité directement.
C’est ce qui s’est passé sur la majorité des réseaux sociaux.
J’ai eu quelques contacts via Google, principalement pour de petites affaires.
La part la plus importante de mon chiffre d’affaire s’est faite grâce au bouche-à-oreilles. J’exerce sur le Choletais, c’est une zone ou le bouche à oreilles est primordial, les gens ont besoin d’être en confiance, surtout pour la profession d’architecte d’intérieur : le client te fait entrer chez lui, te parle de sa famille, se façon de vivre, cela concerne la sphère de l’intime… Il a donc besoin d’être en confiance, beaucoup plus que pour d’autres prestataires.
Ce site s’appelle Eccéité, qu’est ce qui pour toi définit ton eccéité, ta singularité ? La tienne ou celle de ton entreprise ?
Cela pourrait être l’accompagnement des clients. Je n’hésite pas à prendre le temps avec eux, à laisser le temps nécessaire à ce que le projet murisse de leur côté. Je ne vais pas les presser car je sais pertinemment que la prise de décision à la va vite n’est jamais efficace. Et puis surtout dans le cas d’un projet d’aménagement c’est un environnement dans lequel ils vont évoluer pendant un certain nombre d’années donc j’ai besoin d’avoir face à moi quelqu’un qui soit prêt.
Il y a également ma capacité à travailler avec l’outil informatique pour les rendus visuels du projet. Cela permet une plasticité vraiment intéressante, il est possible de tout représenter avec cet outil et le client a une facilité à s’immerger dans le projet. Dans le cadre de l’accompagnement je peux être amené à les emmener dans des salles d’expositions pour choisir des matériaux, cela signifie que l’on va repérer par exemple deux à trois carrelages différents. Je suis en relation avec les fournisseurs, je peux donc récupérer les visuels auprès d’eux, les intégrer et les transformer en matériaux pour ma maquette numérique ainsi le client peut faire un choix le plus pointu possible. Il a vraiment une représentation fidèle de son choix et de l’impact qu’il a sur son projet.
Cette maquette numérique permet une mise en lumière fidèle également car elle est orientée géographiquement, le rendu lumineux est très intéressant et toujours dans la fidélité de la réalité. Le client peut être amené à utiliser du mobilier existant, je vais faire un relevé de cotes, prendre quelques photos, je le modélise, l’intègre à la maquette et le client a vraiment tous les éléments représentés pour avancer.
D’un côté je laisse les clients murir leur projet, de l’autre ils ont un outil visuel performant qui facilite la prise de décision.
Aujourd’hui quels sont tes projets ?
Le premier projet en vue est de consulter un prestataire pour rendre mon site internet plus efficace. Aujourd’hui dans les statistiques je peux voir le parcours des visiteurs, quelle page est la plus visitée dans le site. Mais le but est de capter le visiteur sur la page d’accueil et de le faire cheminer pour l’emmener vers la présentation de mon entreprise puis éventuellement deux ou trois présentations de projets, mais l’objectif c’est de l’emmener vers la page contact. Aujourd’hui la page contact est peu visitée, c’est donc que je perds le visiteur. Le prestataire que j’ai rencontré est spécialisé dans le référencement sans toucher forcément en profondeur au site. On peut avec quelques actions ponctuelles et quelques modifications orienter la perception du site et le rendre plus efficient.
Le second projet sera de remplacer mon véhicule particulier actuel et d’intégrer la location d’un véhicule dans le budget de l’entreprise.
Ou exerces tu ton activité ?
A mon domicile. A la base c’était un bureau qui servait à ma compagne et moi même et accessoirement de chambre d’amis. Je me suis approprié cet espace, l’ai aménagé pour qu’il devienne uniquement mon bureau. A moyen terme, si le développement de l’activité se confirme le projet sera de trouver un local en ville et libérer cette pièce.
As tu envisagé le co-working ?
Oui, mais sur Cholet l’offre est encore assez limitée et puis je ne me voyais pas sortir un loyer tous les mois au début de mon activité, ça me paraissait quelque chose d’ « accessoire ».
Au lancement de ton activité, quelle clientèle avais-tu ciblé ? A-t-elle évolué ?
Je suis parti sur l’optique de travailler avec des particuliers, or l’un d’eux m’a amené à faire de l’aménagement dans le tertiaire et un autre qui est artisan d’art m’a confié la réalisation de l’aménagement d’un espace qui accueillera son atelier de travail et un espace exposition/vente. Cela fait partie des bonnes surprises : un client peut parler de toi autour de lui, te recommander à son entourage, mais lorsqu’il te rappelle lui-même pour un nouveau projet, c’est vraiment satisfaisant.
Avant de te lancer, quelles étaient tes appréhensions ?
Je pense avoir eu des appréhensions « avant » de quitter mon emploi. Car en étant salarié tu as une certaine sécurité, un salaire qui tombe, des avantages… Une fois que ce cap a été passé, après une période de « vide », quand j’ai commencé l’accompagnement et que l’idée de travailler en indépendant a germé, je n’ai pas eu d’appréhensions supplémentaires. Hormis peut être celles de trouver un financement, un assureur, etc, mais sur le fond du projet ce n’était pas forcément une appréhension mais plutôt un sentiment de manque de légitimité. Je n’ai pas eu un parcours classique, linéaire, tel que je me l’étais imaginé en commençant mes études. Cela m’a réellement pesé au départ. Encore maintenant quand j’ai des appels de personnes qui cherchent des stages, je ne me sens pas prêt.
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Une personne que j’ai rencontrée récemment m’a parlé du « syndrome de l’autodidacte », qui explique que lorsque tu ne suis pas le parcours type, apparaît ce sentiment de manque de légitimité et d’assurance.
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Même par rapport aux clients au départ, ce fut difficile, sans doute parce que psychologiquement je n’étais pas encore prêt à m’assumer comme architecte d‘intérieur. Ce sentiment est en train de se « résorber » petit à petit, au fur et à mesure de l’expérience et des résultats.
As tu rencontré des difficultés et si oui lesquelles ?
La principale difficulté a été pour moi de trouver les premiers clients alors même que je n‘avais aucune référence à présenter pour me vendre.
Y-a-t-il quelque chose qui t’impressionnait, te semblait difficile et qui finalement s’est révélé accessible / simple ?
Oui, le processus de la création d’entreprise : il y a avait tant de sujets à aborder qu’au départ, je me suis senti un peu seul ! Et puis avec du recul, un bon accompagnement et un peu de méthode, cela se fait de façon assez aisée.
Quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui souhaite se lancer ?
Être convaincu de sa propre valeur pour convaincre les autres : tête haute, arguments bien rodés et sourire franc même lorsqu’on est fatigué.
Etre tenace : le temps peut parfois paraître bien long lorsque l’on attend les clients.
Se faire aider par des prestataires qualifiés : chacun son métier, on se s’improvise pas comptable, designer web ou graphiste comme cela.
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